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Les sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d’erreur du taux effectif global (TEG)

Après plusieurs mois de controverses au sujet de la sanction applicable en matière d’erreur de calcul du taux effectif global (TEG), le législateur s’est fendu d’une ordonnance n° 2019-740 en date du 17 juillet 2019 à ce sujet, dont on peine toutefois à trouver l’intérêt.

L’ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019

Au terme de son article 1, l’ordonnance du 17 juillet 2019 prévoit qu’en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global, le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice de l’emprunteur.

Cette solution est très avantageuse pour les prêteurs (banques) laisse au juge, laisse au juge le soin d’apprécier l’importance de la déchéance qui sera ordonnée. Dans tous les cas, l’emprunteur (débiteur) devra démontrer concrètement l’étendue de son préjudice, en démontrant notamment qu’il a décliné la proposition de crédit à un taux plus avantageux que lui proposait un autre établissement à cause des informations erronées que lui fournissait le prêteur (la banque).

Le texte ajoute que lorsque le créancier (la banque) est déchue du droit aux intérêts, les sommes perçues indûment sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, et restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

Cette ordonnance est en tout point conforme à l’état actuel de la jurisprudence, qu’elle ne modifie en rien :

  • Cass. civ. 1e, 22 juin 2017, n° 16-17.574 : Mais attendu qu’ayant relevé l’inexactitude du taux effectif global mentionné dans l’offre de prêt, la cour d’appel a retenu, à bon droit, que la déchéance du droit aux intérêts, telle que prévue par l’article L. 312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, était encourue;
  • Cass. civ. 1e, 12 décembre 2018, n° 17-21.240 : Attendu, ensuite, que la sanction en cas d’irrégularité du taux effectif global étant la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels, par application des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, invoqués par la seconde branche, le grief est inopérant (ou encore : Cass. civ. 1e, 23 janvier 219, n° 17-22.420 ; Cass. civ. 1e, 26 septembre 2018, n° 17-15.352 ; Cass. civ. 1e, 6 juin 2018, n° 17-16.30).

Une tentative de clarification ratée

Ainsi, la dichotomie à l’œuvre dans les dernières décisions de la cour de cassation demeure d’actualité :

  • Lorsque l’erreur de calcul du taux effectif global figure dans un contrat soumis aux dispositions du code de la consommation, elle est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts,
  • Lorsque cette erreur figure dans un contrat soumis aux dispositions du code civil, elle est sanctionnée par la nullité de la clause d’intérêts, laquelle entraîne la substitution du taux conventionnel par le taux légal que recherche de nombreux emprunteurs en raison des avantages financiers qu’elle procure.

Cette dichotomie nous ramène au problème de la qualification de contrat réel ou de contrat synallagmatique  qui est sous-jacente dans le débat et à propos de laquelle le législateur ne prend pas position.

C’est pourtant cette question qui méritait toute son attention.

De la séparation des pouvoirs

On s’interroge donc à la lecture du compte-rendu du Conseil des ministres du 2 octobre 2019, qui est perclus d’erreurs et de contre-vérités :

Fruit d’une sédimentation à la fois normative et jurisprudentielle, l’ensemble de ces sanctions présentait un manque de cohérence et de lisibilité auquel l’ordonnance remédie en prévoyant une sanction civile unique en cas de défaut ou d’erreur du taux effectif global (TEG). Le juge peut ainsi désormais prononcer, y compris pour les actions en justice introduites avant la publication de l'ordonnance où il jugerait la nouvelle sanction harmonisée moins sévère que les sanctions précédemment mises en œuvre, la déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur dans la proportion qu’il détermine au regard, notamment, du préjudice pour l’emprunteur.

Non, l’ordonnance ne prévoit aucune rétroactivité, et le rapport au Président de la République du 18 juillet 2019 le rappelait expressément :

L'habilitation ne prévoyant pas que le nouveau régime de sanction doit s'appliquer aux actions en justice introduites avant la publication de l'ordonnance, celle-ci ne comprend pas de disposition sur ce point.

C’est ainsi qu’à cette époque déjà, regrettant manifestement de ne pouvoir traiter cette question, le rapporteur poursuivait :

Il revient donc aux juges civils d'apprécier, selon les cas, si la nouvelle sanction harmonisée présente un caractère de sévérité moindre que les sanctions actuellement en vigueur et, dans cette hypothèse, d'en faire une application immédiate dans le cadre d'actions en justice introduites avant la publication de l'ordonnance.

On s’interroge sur la place de la séparation des pouvoirs lorsque le gouvernement, qui s’est fait déléguer par le Parlement le pouvoir de légiférer en ses lieux et place au moyen d’une loi d’habilitation , recommande aux juges d’appliquer l’ordonnance de façon rétroactive au motif que son défaut d’habilitation ne lui permettait pas de l’autoriser expressément.

Le tout au mépris de l’article 2 du code civil :

La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif.

Maître Raphaël Morenon

Cet article a été écrit par Raphaël Morenon.

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