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Alors que le Gouvernement propose de modifier l’article 1er de la Constitution pour y ajouter que la République favorise la préservation de l’environnement, la diversité biologique et l’action contre les changements climatiques
, l’arrêté du Maire de Langouët du 18 avril 2019 interdisant l’usage de pesticides sur les parcelles proches d’un bâtiment à usage d’habitation ou professionnel a été suspendu par le tribunal administratif de Rennes (TA Rennes, 27 août 2019, n° 1904033) en raison de l’incompétence de l’élu.
A l’approche des élections municipales, la préservation de l’environnement et la lutte contre le changement climatique arrivent en tête parmi les thématiques qui vont compter le plus dans le vote des électeurs (sondage Harris Interactive du 28 et 29 août 2019).
Comment un Maire peut-il répondre aux préoccupations de ses concitoyens en matière de préservation de l’environnement et de leur cadre de vie ?
Quelle place pour le Maire en matière de protection de l’environnement ?
Le Maire dispose d’un pouvoir de police générale sur le fondement de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
Cependant la loi réserve à l’Etat, dans des domaines spécifiques, une compétence de police spéciale, pour lesquelles le Maire demeure compétent pour agir à titre subsidiaire, afin de combler les limites de l’action de l’Etat.
Toutefois, dans le domaine de l’environnement, cette compétence est rarement reconnue au Maire, considérant ainsi que l’Etat sera la seule autorité compétente.
L’exclusivité de l’Etat
Le juge administratif développe une jurisprudence préjudiciable à l’environnement en retenant que plusieurs polices environnementales sont exclusivement exercées par l’Etat, préfet ou ministre :
- police des installations classées (CE, 29 septembre 2003, n° 218217, Houillères du bassin de Lorraine, Lebon) ;
- police de l’eau (CE, 2 décembre 2009, n° 309684, Cne de Rachecourt-du-Marne, Lebon)
- police de la dissémination volontaire des organismes génétiquement modifiés (OGM) (CE, 24 septembre 2012, n° 342990, Cne de Valence, Lebon)
- police des communications électroniques (CE, ass., 26 octobre 2011, n° 329904, Cne de Pennes-Mirabeau, Lebon)
- police des produits phytopharmaceutiques (CAA Nantes, 24 mai 2005, n° 04NT00628, Cne de Mûrs-Erigné)
- police des distributions d’énergie (CAA Nantes, 14 mars 2014, n° 12NT03053, Cne de Le Chefresne).
Le juge considère la complétude de la protection par l’Etat, ne permettant aucune carence justifiant l’intervention subsidiaire du Maire.
Or, l’intérêt d’une action municipale permettrait de suppléer l’Etat, en qualité d’autorité de secours, et de réduire le risque de laisser perdurer les pollutions et nuisances constatées par le maire et ses concitoyens.
Un avocat en droit des collectivités territoriales peut permettre de faire valoir des spécificités locales et de construire les fondement juridiques permettant de mettre en œuvre le pouvoir de police du maire en faveur du respect de l’environnement et de la lutte contre le changement climatique.
Le partage des compétences du bloc communal en matière environnementale
Outre les compétences exclusives reconnues à l’Etat, de nombreuses questions environnementales sont partagées entre les collectivités territoriales. L’intercommunalité, notamment la communauté d’agglomération, représente un échelon pertinent pour mutualiser les actions en faveur de la préservation de l’environnement.
Aux côtés de la Région, chef de file en matière de développement durable, de protection de la biodiversité, de climat, de qualité de l’air et d’énergie, les établissements publics de coopérations intercommunales (EPCI) interviennent, désormais de manière obligatoire, en matière de gestion des déchets, d’eau (assainissement et eaux pluviales urbaines), d’énergie et de lutte contre les pollutions et le climat.
La répartition des compétences est réglementée par le code général des collectivités territoriales, au nom du principe de spécialité et d’exclusivité, n’empêchant pas une articulation des compétences à géométrie variable.
La mise en œuvre partagée de certaines compétences entraîne de facto un enchevêtrement des compétences au sein du bloc communal et un partage des responsabilités.
Ainsi, certains Maires agissent en réaction au renforcement de l’intercommunalité, notamment en refusant de transférer de nouvelles compétences.
L’enjeu des prochaines élections municipales de 2020 sera de clarifier les compétences du bloc communal et de répondre efficacement aux exigences environnementales des concitoyens.
Un avocat en droit des collectivités territoriales peut permettre de faire un état des lieux des différentes compétences partagées et de mener un audit efficace des besoins communaux.
Quels sont les moyens d’action et le rôle du maire en matière d’environnement ?
S’il semble compliqué de décrire entièrement les pouvoirs et obligations du maire en matière d’environnement, ce dernier s’inscrit comme contributeur à la répression des auteurs d’infractions et dispose d’un panel de pouvoirs de police permettant de préserver l’environnement. Son inaction ou son imprudence peut engager la responsabilité de la commune, voire sa responsabilité pénale.
Les pouvoirs du Maire en faveur de l’environnement
Tout d’abord, le Maire contribue à la répression des auteurs d’infraction sur son territoire (dépôts sauvages d’ordures, infraction en matières d’atteintes à la faune et à la flore – chasse notamment, installations classées pour la protection de l’environnement et règlement sanitaire départemental, pollution de l’eau, nuisances sonores et publicité).
Ensuite, le Maire peut toujours agir en cas de péril imminent, notamment pour la santé.
Par ailleurs, la protection de la ressource en eau peut être assurée par le Maire en application de l’article L. 2213-29 du CGCT.
Le Maire est titulaire des pouvoirs de police en matière de :
- prélèvement, puits, forages ;
- récupération des eaux de pluie ;
- police des baignades et activités nautiques ;
- cas de danger grave et imminent ;
- hygiène des voies publiques ;
- police des eaux destinées à l’alimentation humaine.
En qualité de gestionnaire du domaine public communal et d’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme, le Maire peut contribuer au respect de l’environnement en entretenant des espaces naturels et en limitant les risques naturels.
La police de la circulation constitue également être un levier d’action en faveur de l’environnement (art. L. 2213-4 du CGCT). A titre d’exemple, l’interdiction de la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels s’applique en tous lieux, hors des voies ouvertes à la circulation publique. Le Maire peut notamment interdire la circulation de tous types de véhicules sur le rivage de la mer ou des motoneiges à fins de loisirs dans les espaces naturels.
Il peut également réglementer l’accès de certaines voies en prévention de la pollution sonore et atmosphérique. Il peut ainsi :
- instituer des secteurs piétonniers ;
- interdire le passage de poids lourds sur certaines voies ;
- limiter le tonnage autorisé, fixer des horaires de livraison ;
- définir des itinéraires préférentiels pour le trafic de transit, même payants ;
- fixer une vitesse maximale inférieure à celle prévue par le code de la route ;
- améliorer les infrastructures de transport.
Il peut fixer des zone à circulation restreinte (ZCR) dans le but de lutter contre la pollution atmosphérique
(art. L. 2213-4-1 CGCT).
Tous ces moyens d’action permettent au Maire d’agir en faveur de l’environnement. Toutefois, comme toute mesure de police, la légalité de ces mesures pour des raisons environnementales est encadrée par les exigences de motivation, de nécessité et de proportionnalité, prohibant les mesures trop générales ou absolues et portant une atteinte excessive aux droits et libertés en cause.
Ainsi, la consultation d’un avocat en droit des collectivités territoriales permet de sécuriser la légalité des mesures envisagées.
Les devoirs du Maire en faveur de l’environnement
L’inaction du maire dans l’usage de ses pouvoirs de police peut engager la responsabilité de la commune. A titre d’exemple, la carence du maire dans la mise en œuvre d’une mesure de police visant à protéger la salubrité publique, dans l’hypothèse de pollution d’un cours d’eau, engage la responsabilité communale pour faute simple (CAA Lyon, 10 juin 2010, n° 08LY00621).
En application des dispositions de l’article L. 2122-18 du CGCT, le Maire répond des inobservations des prescriptions pénalement sanctionnées. La responsabilité pénale des maires peut être engagée au titre de leur compétence d’administration de la commune, ainsi qu’à raison de l’exercice de leurs pouvoirs de police.
L’inertie ou l’attentisme d’un Maire est donc condamnable : un maire a été condamné pour avoir résisté à la mise en place d’une station d’épuration (Crim. 2 mai 2001, n° 00-84.580).
Dans une affaire de pollution de cours d’eau provoquée par des effluents de purin dans le réseau communal d’eau pluviale, la responsabilité pénale du maire a été retenue au motif qu’il n’avait pas fait usage de ses pouvoirs de police pour réglementer les épandages de lisier (Crim. 28 février 1996, n° 95-80.580).
La préservation de l’environnement fait donc partie des obligations du maire.
En dehors des pouvoirs et des devoirs, le Maire à la faculté d’être un acteur de sensibilisation de la population aux démarches éco-responsables (traitements des déchets, services publics municipaux écologiques, cantines scolaires, etc.).
Cet article a été écrit par Zoé PONCELET. |
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